Hommage à Pierre SEMARD, en gare d'Aubagne le 7 mars 2012, par un représentant de la CGT cheminot
Dans toute la France, aujourd’hui, la Fédération CGT des cheminots rend hommage à Pierre SEMARD.
Cheminot, fils de cheminots, Pierre SEMARD était né le 15 février 1887. Son père était un travailleur du rail, un cantonnier. Sa femme garde-barrière était la fille d'un mécanicien qui avait perdu les deux jambes dans un accident de chemin de fer. Toute sa famille avait travaillé en gare de Valence.
Pierre avait commencé sa vie professionnelle à l'âge de 15 ans, comme cheminot.
En 1942, Pierre SEMARD avait quarante ans de vie professionnelle et militante derrière lui. Comme dirigeant syndicaliste CGT et comme dirigeant communiste.
Il était le secrétaire général de la Fédération CGT des Cheminots depuis 9 ans. Administrateur salarié de la SNCF, il avait été révoqué après la grande grève de 1938.
Il avait été arrêté le 16 octobre 1939 et condamné à 3 ans de prison par le tribunal militaire de Paris pour activité syndicale et infraction au décret de dissolution du Parti Communiste Français. Car Pierre était membre du Comité Central du PCF et ancien secrétaire général de ce Parti.
Emprisonné successivement à Fresnes, à la Santé, prison parisienne, à Bourges il reste en contact avec les organisations de la Résistance des cheminots qu’il conseille contre l’occupant. Il encourage ses compagnons de captivité à ne pas signer une déclaration de fidélité à Vichy.
Son épouse Juliette était son agent de liaison avec la direction illégale de la Fédération des cheminots CGT. Arrêtée, elle aussi, Juliette fût condamnée à 8 ans de travaux forcés, puis déportée à Ravensbruck jusqu’au 24 juin 1945, date de la libération de ce camp. A la veille du 8 mars, journée des droits de la femme, il n’est pas inutile de rappeler cette page d’histoire.
A la fin de sa détention, Pierre SEMARD fût livré par Vichy à la Gestapo comme otage pour être fusillé. C’était le 7 mars 1942 à la prison d’Evreux. Il y a aujourd’hui 70 ans !
Peu avant son exécution, Pierre écrit cette lettre dont voici un extrait:
Chers amis,
Une occasion inespérée me permet de vous transmettre mon dernier mot, puisque dans quelques instants je serai fusillé.
J'attends la mort avec calme. Je démontrerai à mes bourreaux que les communistes savent mourir en patriotes et en révolutionnaires.
Ma dernière pensée est avec vous, camarades de lutte, avec tous les membres de notre Grand Parti, avec tous les Français patriotes, avec les héroïques combattants de l'Armée Rouge ( …). Je meurs avec la certitude de la libération de la France.
Dites à mes amis, les cheminots, que ma dernière volonté est qu'ils ne fassent rien qui puisse aider les nazis.
Les cheminots me comprendront ; ils m'entendront ; ils agiront; j'en suis convaincu.
Adieu, chers amis, l'heure de mourir approche. Mais je sais que les nazis, qui vont me fusiller, sont déjà vaincus et que la France saura poursuivre le grand combat. Vivent l'Union Soviétique et ses Alliés ! Vive la France.
Pierre SÉMARD.
Nous étions en mars 1942 et les troupes nazies avançaient partout en Europe !
En assassinant le dirigeant syndical et politique de premier plan qu’était Pierre, les nazis et les hommes de Vichy pensaient porter un coup décisif à la Résistance des cheminots. Le résultat fût inverse : dès la nouvelle diffusée par la presse clandestine : Vie ouvrière, Tribune des Cheminots, Humanité et également tracts circulant sous le manteau, les sabotages des installations ferroviaires s’accentuèrent considérablement. Sablage de boîte d’essieux, tuyaux d’accouplement crevés, compresseurs sabotés, étiquettes d’acheminement des wagons intervertis, voies ferrées sabotées, ponts détruits, etc.
Malgré la répression de l’occupant nazi et de ses sbires, la lutte des cheminots alla crescendo jusqu’à la grève insurrectionnelle dans les centres ferroviaires du 18 août 1944.
Cette Résistance cheminote jointe à la Résistance des autres corporations et de tout un peuple créa les conditions de la Libération du pays.
Quand le PDG actuel de notre entreprise fait acte de repentance pour la SNCF qui, d’après lui, aurait collaboré, il oublie la lutte héroïque de résistants comme Pierre SEMARD et ses camarades. La SNCF, c’était d’abord les cheminots et non les hommes nommés par Vichy à la tête de l’entreprise. Avec cette repentance, la Direction SNCF actuelle se sent peut-être quelque part du côté des collaborateurs et du régime de Vichy.
Le message de résistants comme Pierre, c’était que la Libération de la France devait s’accompagner de l’avènement d’une République plus humaine et plus solidaire.
Ce fût fait plus tard avec la mise en place d’un gouvernement chargé d’appliquer le programme du Conseil National de la Résistance. Ses réalisations les plus connues furent : la Sécurité Sociale avec Ambroise CROIZAT, l’EDF avec Marcel PAUL, le secteur nationalisé avec La Régie Renault, etc. Il serait trop long de tout citer. Demain, c’est le 8 mars ! N’oublions pas que le vote des femmes aux élections a été un acquis de ce gouvernement.
Tout ce qui avait été rêvé par Pierre et ses camarades au plus noir de l’Occupation et de la Collaboration fut donc en grande partie réalisé dans l’immédiat après guerre.
Faut-il rappeler à M. le PDG de la SNCF que
- 8938 cheminots sont morts pour la libération de la France !
- 15977 cheminots furent blessés.
- La légion d’honneur et la Croix de Guerre avec palme ont été décernées à la SNCF et à ses véritables représentants, les résistants cheminots.
Pour être fidèle à Pierre et à tous les résistants, dont l’œuvre a permis les 30 années dites glorieuses et la reconstruction de la France, œuvre aujourd’hui menacée par les attaques incessantes du MEDEF et de ses représentants à la tête de l’Etat, il nous faut lutter tous ensemble à l’avènement d’une France Citoyenne et solidaire.
Merci Pierre SEMARD pour ton courage et l’exemple que tu nous as donné !
Merci aux représentants de la Municipalité ici présents, Christian FAGLIA représentant le maire d’Aubagne et Mme ROYERE conseillère municipale !
Merci aux syndiqués de l’Union locale CGT d’Aubagne ici présents !
Merci à la direction de l’Union syndicale des retraités CGT d’Aubagne !
Merci aux représentants de la section d’Aubagne du PCF !
Merci aux représentants des combattants ou anciens résistants de votre présence !
Merci à tous les présents. Mettons ensemble cette gerbe !
Je vous demanderai ensuite une minute de silence.
…… / ……
Merci.