Début de l'Intervention à l'assemblée nationale d'André Chassaigne
Député du Puy-de-Dôme, Groupe Communistes, Républicains et Citoyens le 17 juillet 2013
Chers collègues,
C’est avec gravité et préoccupation que je prends la parole sur ce projet de loi d’affirmation des métropoles.
Je veux tout d’abord élever une protestation solennelle contre les conditions d’examen de ce projet de loi. Alors que ce texte porte un bouleversement institutionnel inédit de l’organisation de notre République, nous sommes sommés de l’examiner dans les pires conditions : en trois jours, en session extraordinaire, à la veille de la trêve estivale, sans préparation et sans concertation.
Le texte a en effet été modifié du tout au tout en commission, avec un mépris non dissimulé pour le travail des sénateurs. L’article 24 de la Constitution dispose pourtant que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République. Qu’importe, rien ou presque de ce que nos collègues ont voté n’a été maintenu.
A la dernière minute, en catimini, le Gouvernement, avec la complicité d’une poignée de députés, a réécrit intégralement le texte pour y réintroduire la métropole du Grand Paris. Il en résulte une copie particulièrement indigeste. Remodeler de fond en comble la République par voie d’amendement en commission, c’est une insulte au Parlement, aux élus et aux citoyens.
Ceci achève de nous démontrer que, sur ce texte comme sur tant d’autres, les conditions d’un travail parlementaire de qualité ne sont pas réunies. A titre d’exemple, le rapport a été rendu public trente minutes avant la clôture du délai de dépôt des amendements. Pour une réforme de cette ampleur, c’est d’une extrême gravité.
Je joins par conséquent ma voix à celles, nombreuses, qui se sont déjà élevées sur les bancs de la gauche pour dénoncer l’irrespect avec lequel le Parlement est traité. Il est regrettable qu’en la matière, aucun changement n’ait pu être constaté par rapport au précédent quinquennat.
Agenda surchargé, délais procéduraux foulés aux pieds, niches parlementaires vidées de tout sens, utilisation du vote bloqué et des secondes délibérations, recours au temps législatif programmé… Tout est fait pour priver la représentation nationale de ses facultés et de sa légitimité.
Aucun de nous ne peut accepter que le Parlement soit abaissé de cette façon. La caporalisation des député-e-s est-elle un hasard, à l’heure où nous débattons d’un texte qui prive justement les élus territoriaux de leurs marges de manœuvre ? La défiance pour les parlementaires, sommés de légiférer dans l’urgence et dans le silence, s’abreuve à la même source que la défiance pour les élus locaux. L’irrespect pour les élus, pour le pluralisme, pour la libre expression des divergences, est général. En cela, ce projet de loi est un symptôme de l’ensemble des dysfonctionnements actuels.
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Je veux maintenant me faire le porte-parole des élus locaux, c’est-à-dire de ceux qui participent à enraciner la République sur chaque parcelle du territoire. Parmi eux, nombreux sont ceux qui sont mobilisés, en ce moment même, devant notre Assemblée. Au-delà des appartenances politiques, ces hommes et ses femmes engagées pour leurs concitoyens dénoncent la mise au pas des territoires.
Il s’agit bien de cela lorsqu’on entend donner tant de pouvoirs à l’instance métropolitaine, lorsqu’on vide les communes de leur capacité d’action, lorsqu’on programme la disparition des départements, lorsqu’on fait reculer à ce point la mission d’égalité de l’Etat.
Quel que soit l’avis que l’on peut avoir sur ces transformations, elles sont tellement lourdes de conséquences, et d’abord pour la vie quotidienne de nos concitoyens, qu’une seule question se pose : où sont les citoyens dans tout cela ?
Où sont les citoyens, alors que ces trois jours de discussion auraient pu être précédés dans le pays d’un vaste débat démocratique ? Où sont les citoyens, alors que le Gouvernement aurait pu être animé de la volonté d’informer, de faire réagir les populations et de les impliquer ? Où sont les citoyens lorsque ce projet de loi, au lieu de s’adresser à leur intelligence, orchestre dans l’ombre une véritable reprise en main des instances locales ? -/-
Avec cette nouvelle organisation territoriale, s’agit-il bien de lutter contre la crise ?
Je cite l’exposé des motifs de votre projet de loi : « Notre pays a plus que jamais besoin d’une action publique efficace pour améliorer la compétitivité de ses entreprises. »
Compétitivité ! Ce mot qui figure ouvertement dans le texte, repris nombre de fois, constitue la logique profonde de ce projet, sa seule logique, une logique de fer, une logique qui prétend guider toutes les transformations institutionnelles. Sur ce point encore, comment ne pas voir que ce projet est le symptôme du mal qui ronge l’ensemble de ce quinquennat ?
Le terme de « décentralisation » qui était en bonne place il y a encore quelque semaine – puisqu’on parlait d’acte III de la décentralisation ! – a été abandonné en rase campagne. Il n’était pas tenable au vu du contenu des différentes versions de l’avant-projet de loi. La décentralisation a donc été sacrifiée sur l’autel de la compétitivité. Avec cette philosophie, l’action publique n’a plus pour vocation l’intérêt général et la maitrise citoyenne, elle n’a plus pour vocation de répondre aux besoins humains, sociaux, économiques, environnementaux, démocratiques ; elle doit être mise au service de la rentabilité maximale, de la baisse du coût du travail, des largesses faites au capital, de la financiarisation ! Avec cette conception, c’est la fonction même des collectivités territoriales qui est interrogée. Votre projet, c’est la mise en coupe réglée de l’action publique locale pour qu’elle ne soit plus que la réplique de la politique menée au plan national. Ainsi, nos communes, nos départements, nos régions, de boucliers anti-crise qu’ils étaient, risquent de devenir des relais de la compétition mondialisée.( fin de citation)
Nous vous invitons à lire la suite sur le site pcf.fr .
Nous communistes et membres du Front de Gauche d'Aubagne sommes demandeurs d'un référendum populaire sur le sujet; la démocratie locale ne peut être enterrée en catimini en profitant de l'époque estivale.. Nous sommes pour une 6° République avec la démocratie comme axe central !